Nuit douce dans notre montagne. Elle n'est pas guerrière pour un sous malgré la présence de Sparte dans la vallée. Aucun soldat dans les environs, les grelots des moutons ne sont pas encore considérés comme des armes par destination, même si le soleil donne parfois à leur gilet de laine une teinte jaunie. Délicatement sorti des cimes le soleil nous caresse le visage avec douceur. C'est le signal. On prend la route sinueuse qui nous mène à Mystras. On remet ensuite la route où elle était, tout bien réfléchi, nous n'avons pas la place de la garder dans le van. Sur une colline adjacente les ruines de la cité byzantine nous attendent sans broncher depuis le XIIIème siècle. Grecs, français, italiens et turcs se sont succédé ici, construisant là une charmante église orthodoxe, là un palais, là un fort imprenable, là dji Doucouré. C'est une colline-musée, figée dans le temps. Seules de belles fleurs rouges ont réussi à en franchir l'enceinte et partagent maintenant l'affiche de ce que la vanité humaine pensait impénétrable. Frédéric parvient habilement à ne pas payer l'entrée, ce qui permettra probablement au groupe de faire péter sa bouteille de sky au Macumba de Téhéran sous peu. (Vaut-il mieux être sous peu ou moins que rien?) Beaucoup de français dans les ruines, le jeu « Bonjour ou Yassas », qui consiste à deviner la nationalité de son interlocuteur avant toute interaction autre que visuelle, prend tout son sens. Dans le ciel, le bleu s'apprête à boire une tasse orageuse, générant des couleurs incertaines.

Suite à cette belle matinée on déjeune sous les yeux d'une statue-hoplite sur la place du village actuel de Mystras. Salade grecque pimpée comme dans un show de MTV, avec des champignons mais sans jantes alu. Un homme du village nous offre spontanément de petits sablés faits par sa maman et qui raviront nos papilles lors du dessert. Après le déjeuner, petit tour du village dans notre traditionnelle recherche de bougatsa, sans succès ni saint honoré. On part direction le sud et la péninsule de Mani pour notre second workaway du voyage. On a eu très peu de contacts avec nos hôtes donc l'incertitude est grande sur la suite des aventures, mais on a le nom d'un village, Aghios Nikolaos. En attaque ! Les orangers de la vallée sont remplacés par des oliviers au fur et à mesure que la route s'élève. Le village est petit, charmant. Une église, une taverne, un magasin fermé. Une vue à couper le souffle de chaque côté. On est accueilli par deux autres workawayers français qui viennent de La Réunion : Stella et Anthony. Ils nous montrent notre chambre : c'est le luxe. Un véritable petit studio tout équipé, servant l'été de refuge à des randonneurs de passage, avec une vue incroyable sur la montagne environnante. Le balcon nous donne bien envie mais la météo capricieuse nous fait plutôt opter pour le moelleux du canapé pour se reposer. On est un peu perdu dans un si grand espace.

Nos hôtes sont absents et Stella nous présente l'environnement qui a l'air particulièrement relax. Peu de contacts avec les hôtes et peu de travail à faire pour eux depuis leur arrivée. Cela devrait changer avec le début de la récolte des olives. De notre côté on sait à quoi s'attendre et quelques jours de pause avant le travail de récolte assez physique ne nous semble pas de trop. On prend nos marques en faisant une ballade dans les environs. Les petites montagnes sont vertes d'oliviers, tour à tour douces ou accidentées : c'est simplement beau. En rentrant on entend dans le lointain un mégaphone diffus que nous identifions à juste titre comme celui d'un vendeur itinérant. Ce sont des fruits et légumes. On fait une razzia avec un enthousiasme débordant à l'idée de cuisiner dans une vraie cuisine. On dînera d'ailleurs des aubergines revenues dans un mélange miel-gingembre-soja des plus délicieux. La taverne est remplie, on devine les vieux du village devisant ou jouant aux cartes autour d'un ouzo. Nous résistons cependant à son attrait pour ce soir. Soyons sage, car demain est un grand jour.